Autrice et illustratrice ayant également travaillé pour de grands studios d’animation (comme Nickelodeon et Dreamworks TV), Beatrice Blue nous a totalement conquises dès la publication de son premier album. Un vrai coup de coeur, puisque son deuxième album publié en France s’est imposé comme une évidence pour notre Abo du Goupil. Si, actuellement, seulement deux de ses albums sont disponibles en français, on nous souffle à l’oreille que son plus récent, Once Upon a Mermaid’s Tail (Il était une fois le secret des sirènes) devrait apparaître sur nos étagères d’ici quelques mois… Au Rat Conteur, vous trouverez aussi son livre-documentaire, Wonder, où elle explique et raconte sa passion pour l’illustration. Aujourd’hui, Beatrice Blue vit dans les montagnes espagnoles.
Accompagnée de son mari et de son chien Jungle, elle y écrit et illustre ses prochains albums – qu’il nous tarde de découvrir. Nous vous proposons aujourd’hui d’en découvrir plus sur elle, grâce à cette interview qu’elle a très gentiment accepté de nous accorder.
Notre première question est digne d’une équipe de libraires Chacune d’entre nous se souvient encore de l’instant où, enfants, nous sommes entrées pour la première fois dans une librairie ou une bibliothèque. C’est là que nous avons découvert la magie d’être entourées de centaines d’histoires.
Est-ce que vous avez des souvenirs particuliers d’une visite en librairie ou en bibliothèque quand vous étiez jeune ?
J’ai grandi dans un village où il n’y avait pas de grande bibliothèque, ni de belle librairie. Je crois que la première fois que j’ai visité un tel lieu, je n’étais déjà plus une enfant. Je ne me souviens plus exactement de quand c’est arrivé, mais je sais d’où me vient ma passion pour les livres. Ma maman nous lisait, à ma soeur et moi, une petite histoire chaque soir. J’ai grandi avec les mots des Frères Grimm et de Charles Perrault. Je me souviens aussi que mon école avait une jolie petite bibliothèque. C’est là que j’ai lu Matilda pour la première fois. À partir de là, ma passion pour les livres et les histoires s’est développée naturellement. En plus de ça, mon grand-père était peintre. Il possédait beaucoup de livres et d’objets un peu étranges, et je me souviens que je passais des heures à les observer et à imaginer les histoires qui s’y cachaient. Plus grande, j’ai lu “L’ombre du vent” de Carlos Ruiz Zafon. Sa façon de décrire la bibliothèque et ce qui s’y déroule est aussi devenue un élément clé de ma passion pour la lecture.
Nombre d’entre nous, lecteurs, ont en tête un roman ou un album qui a influencé notre enfance et notre amour de la lecture. Est-ce que vous avez, vous aussi, un livre qui vous a particulièrement touchée dans votre enfance, dont vous vous souvenez toujours avec émotion aujourd’hui. Ou peut-être y a-t-il eu un livre qui vous a donné envie de devenir illustratrice et autrice?
Matilda, de Roald Dahl, est un roman que j’adorais, petite. Quand j’ai eu 9 ans, j’ai commencé à lire Harry Potter j’ai dévoré la saga. C’est drôle d’y repenser… Quand le premier livre est sorti, personne dans mon entourage ne connaissait la série, ça me donnait l’impression que le monde de Harry Potter m’appartenait. Les livres qui m’ont le plus donné envie de raconter des histoires sont ceux de Neil Gaiman. J’étais déjà une jeune adulte quand je les ai lus et ils ne sont pas vraiment comparables au type d’albums que j’écris, mais ils m’ont aidée et m’aident toujours à nourrir mon imaginaire. Peter Pan de J.M. Barrie et les histoires de Rudyard Kipling ont également été une grande inspiration depuis mon enfance.
Petites, nous avons toutes rêvé de recevoir notre lettre pour Poudlard et d’y être transportées comme par magie. Un souvenir inoubliable qui a inspiré notre prochaine question si vous pouviez choisir de vivre dans un monde tiré d’un livre (comme Poudlard, Panem ou le Pays Imaginaire), lequel choisiriez-vous. Vous pouvez évidemment choisir le monde créé pour un de vos albums !
Oh non! Quelle question difficile. En particulier avec les exemples mentionnés. Poudlard aurait sûrement été incroyable, mais impossible de choisir entre le monde des sorciers et le Pays Imaginaire. On peut peut-être les mélanger ?
Faisons un bond dans le temps pour en revenir au moment présent. Deux (et bientôt trois !) de vos albums réimaginent l’origine des pouvoirs de créatures fantastiques, comme la capacité des dragons à cracher du feu ou les cornes des licornes. D’où vous est venue cette idée. Est-ce que vous avez toujours été fascinée par les créatures fantastiques ?
Absolument. Les créatures fantastiques ont toujours fait partie de moi, dès mon plus jeune âge. L’histoire de Jeanne et de la petite licorne, qui explique d’où viennent les cornes des licornes, faisait au départ partie d’une autre de mes histoires, Once Upon a Story Storm (“Il était une fois une tempête d’histoires”) et c’est de là que m’est venue l’idée d’en faire une série d’albums.
Il y a un fort message d’acceptation de la différence dans vos deux albums, Il était une fois la corne des licornes et Il était une fois le feu des dragons. Est-ce qu’il était très important pour vous de transmettre un message de tolérance, d’encourager vos lecteurs et lectrices à aider d’autres humains (et créatures !) plutôt que de les juger ?
Totalement. D’ailleurs, c’est même la première chose à laquelle je pense quand je commence à écrire une histoire quelle thématique je souhaite aborder. Ensuite seulement, je commence à développer l’histoire.
Passons à une question plus légère. Est-ce que vous cachez des Easter Eggs (références ou clins d’oeil cachés) dans vos albums. Et si c’est le cas… pouvez-vous nous donner un exemple ?
Oui, en effet. Comme je travaille sur des films d’animation en même temps que sur des albums, c’est quelque chose que je ne peux pas m’empêcher de faire. Alors, un exemple: dans mon premier album, Il était une fois la corne des licornes, un petit oiseau jaune apparaît sur presque toutes les pages. Dans le deuxième album, Il était une fois le feu des dragons, c’est un petit oiseau rouge que l’on voit à chaque apparition de Freya et Sasha. Et à la fin de cet album, le petit oiseau jaune d’Il était une fois la corne des licornes rencontre l’oiseau rouge… On peut les voir s’envoler ensemble à la fin de l’album !
La prochaine question vous a peut-être déjà été posée et ce ne sera pas facile d’y répondre. Y a-t-il des illustrateurs ou des auteurs (qui travaillent pour la littérature jeunesse, ou dans d’autres genres de livres, ou même dans l’industrie du film et de l’animation) que vous admirez et avec lesquels vous adoreriez travailler? D’ailleurs, vos albums feraient d’incroyables courts-métrages !
Oh oui, définitivement. Il y a énormément d’artistes incroyables avec qui j’adorerais travailler. J’adore le travail de Matt Forsythe et de Rebecca Green, parmi tant d’autres. J’aime également beaucoup le travail magnifique de Tonko House, un studio d’animation. En fait, la liste d’artistes dont j’adore le travail est vraiment longue.
Vous écrivez et vous illustrez vos histoires. Quel procédé se cache derrière la création de vos personnages, d’un point de vue illustration. Est-ce que vous tirez l’inspiration de ce qui vous entoure, ou est-ce que vous avez une idée précise de l’apparence de vos personnages dès que l’idée de l’histoire vous vient?
Un peu des deux. Pour commencer, je réfléchis aux valeurs que je souhaite aborder et transmettre, ainsi qu’à quel type d’histoire j’aimerais raconter. C’est un bon moyen de définir avec plus de précision le type de personnages dont j’aurai besoin pour raconter mon histoire. Une fois que j’en sais plus sur la personnalité de mes personnages, c’est plus facile de les concevoir, puis de les illustrer.
Une dernière question artistique. Quelles techniques utilisez-vous pour vos albums? Est-ce que vous dessinez à la main pour commencer? Est-ce que vous êtes plutôt du genre à tout planifier à l’avance, ou plutôt à tout dessiner d’un coup, quand l’inspiration arrive?
Je planifie tout. Je commence avec une idée assez vague, puis je l’affine de plus en plus, jusqu’à parvenir à un résultat très spécifique. J’essaie également d’être relativement précise en terme de délais et je fais de mon mieux pour être efficace dans mon travail. Cette organisation m’aide à anticiper ce qui va suivre et à ne pas me laisser submerger par la quantité de travail qui m’attend. J’avance plutôt pas à pas.
Notre librairie est spécialisée en littérature jeunesse et en jeux et jouets. Nous voyons donc passer beaucoup d’enfants chaque jour… Il est bien connu que certains d’entre eux n’ont presque pas de filtre et disent souvent ce qu’ils pensent. Quelle a été la réaction la plus drôle et/ou touchante que vous ayez eue de la part d’un jeune lecteur ou d’une jeune lectrice ?
Après une lecture publique d’un de mes albums, j’ai reçu de magnifiques dessins d’enfants de 4 à 7 ans. Sur un d’entre eux, un enfant avait représenté un cheval magique avec une corne, qui était en fait une maison. Et sur le dessin, il y avait une question “ Chère Beatrice Blue, comment vous faites pour que vos livres soient si propres ?” .
Si vous pouviez dire une seule chose à ces jeunes lecteurs (et leurs parents !), qu’est-ce que ce serait ?
Sûrement que chaque petit instant, comme celui où on lit un livre ensemble, est plus important que tout l’or du monde et durera une vie entière. C’est un honneur d’avoir écrit des histoires qui permettent de créer des instants de retrouvailles en famille… et j’espère pouvoir en écrire bien d’autres !
Dernière question, nous espérons que vous allez l’aimer. Tout un univers et toute une histoire se cachent derrière notre librairie. Il y a par exemple Rufus, le rat qui adore les histoires. Edmée, qui livre des histoires aux enfants en Suisse ou Poema, la loutre-bibliothécaire lacustre. Si vous pouviez ajouter une créature à ce monde, quelle serait-elle Bien sûr, les licornes et les dragons sont aussi permis, tant qu’ils ne mangent pas Rufus !
Oh, c’est génial! D’après moi, ce serait super d’avoir une petite créature, du nom de Momo, qui apparaît la nuit et murmure des rêves magiques sous forme d’histoires à tous ceux qui le souhaitent !
Merci encore d’avoir accepté de répondre à nos questions. C’est un vrai plaisir de pouvoir interviewer une autrice et illustratrice que nous admirons tant. Nous espérons pouvoir vous voir un jour au Rat Conteur, quand nous pourrons de nouveau voyager.
Merci beaucoup de m’avoir contactée. C’était super de pouvoir répondre à toutes ces questions. J’espère pouvoir visiter votre librairie dans un futur proche !
Il était une fois la corne des licornes, Il était une fois le feu des dragons et Il était une fois le secret des Sirènes aux Editions Little Urban.
Wonder - The art and practice of Beatrice Blue - Editions 3dtotal Publishing